Le vote en Tunisie vu par le petit bout de ma lorgnette.

Ce jour là j'étais à Akouda. J'ai rencontré des Tunisiens avec un doigt noir. Ils arboraient avec fierté et une joie extrême ce que je croyais être du henné. Je leur ai demandé ce que signifiait ce signe. Puisque je ne parle ni ne comprends la langue Tunisienne j'ai eu bien des difficultés pour découvrir de quoi il s'agissait. Puis j'ai appris qu'ils étaient allés voter et que pour qu'ils ne puissent pas voter une deuxième fois dans un autre bureau de vote, ils avaient trempés leur doigt dans une encre indélibile.

A partir du moment où j'ai enfin réalisé que j'assistais à cet événement, j'ai vu combien ils étaient heureux d'avoir pu prendre part à une décision qui engage leur destin. Ce qu'ils me disaient, aussi bien les femmes que les hommes c'était :
- "Tu te rends compte j'ai 31 ans, 37 ans, 40 ans, 80 ans et j'ai voté pour la première fois de ma vie."

Dans les bureaux de vote les files d'attente ont duré toute la journée. A certains moments, elles étaient si longues que les rangs continuaient à l'extérieur des cours d'écoles où avaient lieu les élections.

Je devais accompagner mes amis Tunisiens jusque dans le bureau de vote mais la foule était trop importante et j'ai du y renoncer à mon grand regret. Ici, j'ai une pensée toute particulière pour mes deux amies qui n'ont pu voter qu'à la toute dernière minute.

La joie des Tunisiens m'a profondément bouleversée. Elle était palpable. Je l'ai ressentie au plus profond de mon coeur. Je suis heureuse d'avoir été là, ce jour là. Je pense que je n'oublierai jamais ce moment, que je n'oublierai jamais le visage rayonnant de ces hommes et de ces femmes.

Je m'étonne que les médias ne mettent pas plus l'accent sur l'importance émotionnelle de cette journée. On nous parle de pourcentage : 90 %. C'est froid, il n'y a pas d'humanité là-dedans. La ferveur, l'espoir d'un peuple, ça n'aurait donc pas plus d'importance qu'un chiffre ? Bien sûr que tout ne sera pas facile et que certains émettent déjà des doutes et des inquiétudes bien légitimes. Décrire la participation, l'enthousiasme des citoyens est-ce si difficile ?

Rêvons d'un avenir meilleur, INCH'ALLAH.